Pogacar vainqueur de Liège-Bastogne-Liège : “On n’attaque pas pour être accompagné par dix gars…”
Vainqueur de la Doyenne pour la seconde fois de sa carrière, le Slovène a mis en pratique un scénario qui semblait écrit.
- Publié le 22-04-2024 à 06h23
- Mis à jour le 22-04-2024 à 07h52
”Quand Tadej ne court pas en compétition pendant un trop long moment à son goût, il devient un véritable tigre…” En prélude à une Doyenne lors de laquelle son coureur épinglait dimanche son premier dossard depuis près d’un mois et un Tour de Catalogne conclut victorieusement (quatre étapes en plus du général), Joxean Fernandez Matxin, le manager sportif de la formation UAE, avait planté le décor des ambitions de Pogacar sur lesquelles le Slovène lui-même n’avait laissé planer aucune once de doute. “Je n’envisage pas une seule seconde la défaite…” avait-il ainsi soufflé vendredi après-midi depuis son hôtel de Bilzen après avoir pris soin de reconnaître la finale du dernier volet du triptyque ardennais. Une détermination que le résident monégasque a fait rimer avec domination sur les pentes d’une Redoute décisive pour la troisième de rang et redevenue le plus beau des tremplins vers la victoire à Liège.
Une attaque panifiée
Loin de son solo de près de 80 bornes sur les Strade Bianche début mars, Pogacar a cette fois eu la délicatesse d’attendre les premières pentes du raidard de Remouchamps pour s’envoler vers le succès à 35 kilomètres de la ligne tracée sur le quai des Ardennes. “Mon équipier Domen Novak avait assuré un incroyable boulot dans toute l’approche de cette difficulté stratégique et a ensuite encore réussi à faire le tempo dans les premiers hectomètres de la Redoute, racontait Pogui à sa descente du podium. J’ai ensuite placé mon attaque. C’était vraiment à fond jusqu’au sommet…”
Quand on attaque, c’est rarement pour être accompagné par dix coureurs...
Un mouvement de course bien plus planifié que son offensive sur les chemins de terre toscans où il était passé à l’attaque 30km plus tôt que prévu lors du briefing. “Nous avons appliqué notre plan stratégique à la lettre, souriait ainsi l’équipier slovène du double vainqueur du Tour. Quand van der Poel et d’autres rivaux ont été un temps retardé par une chute, nous n’avons pas accéléré mais prolongé le gros tempo dans lequel nous étions engagés. Nous avions prévu de rouler fort à cet endroit important de la course, sur des routes étroites qui amenaient au coeur d’une zone sur laquelle les difficultés s’enchaînaient. Tadej nous a très vite dit qu’il avait des super jambes mais lui comme nous sommes restés calmes jusqu’à la Redoute où il était prévu que notre leader passe à l’action.”
Le cap de la minute, son boost mental
Adepte des plaisirs solitaires, celui qui a décroché dimanche son sixième succès en dix jours de course cette saison (!) s’envola alors vers l’un de ses irrésistibles solos. “Est-ce que je m’entraîne pour ces efforts en solitaire ? Non, pas vraiment, cela n’aurait pas de sens de répéter ce genre de trucs hors compétition (rires)… Mais quand on attaque en course, c’est rarement pour se retrouver accompagné de dix coureurs, on a toujours envie de faire une vraie décision. Une fois lancé dans une manœuvre comme celle-là, on se bat d’abord contre soi-même et la douleur afin de réussir à faire fructifier son avance. Et quand elle atteint la barre de la minute, on bénéficie alors d’une sorte de second souffle, d’une nouvelle motivation. Ce dimanche, le vent soufflait principalement de face dans toute la finale, et la mission n’était clairement pas facile...”
Parti habillé comme un cosmonaute dimanche matin, Tadej Pogacar avait retrouvé une allure davantage printanière un peu plus de six heures plus tard. “Durant la première partie de la course, j’ai veillé à avoir toujours le plus chaud possible mais j’ai aussi pris soin de la sécurité en me montrant très vigilant aux pièges du parcours.”
Un clin d’œil à peine voilé à sa chute de l’année dernière en amont de Bastogne qui l’avait empêché de batailler pour la victoire pour la seconde année de rang. “Il y a deux ans, j’avais fait l’impasse sur la Doyenne en raison du décès de la maman de ma compagne Urska. En franchissant la ligne, c’est donc à elle que j’ai dédié cette victoire en pointant mes doigts vers le ciel. C’est ici que j’ai disputé mon premier monument en 2019. J’avais terminé 18e et étais instantanément tombé sous le charme d’une épreuve que je savais taillée pour mes qualités. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si c’est ici que j’ai aussi remporté le premier monument qui figure à mon palmarès (2021).”
Un duel monumental face à van der Poel
Avec un Tour des Flandres (2023), trois Tours de Lombardie (2021, 2022 et 2023) et désormais, donc, deux Doyennes, l’homme aux 70 succès UCI a rejoint dimanche un certain Mathieu van der Poel au palmarès des coureurs en activité les plus “monumentaux” de l’histoire qu’emmène Eddy Merckx (19). “On s’entend bien avec Mathieu. Il m’a glissé qu’il allait désormais partir en vacances à Dubaï. Peut-être en profitera-t-il pour signer un contrat avec notre équipe UAE (rires)… Je serais bien tenté de l’accompagner, mais j’ai un boulot à faire en Italie sur le Giro.”